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  • Deniz Yoruç

JIMMY RICHER : ARTISTE EMERGENT MONTPELLIÉRAIN


Cartel Jimmy Richier
Vue de l'exposition Jimmy Richier : Ni plat Ni Sphère 2, galerie chantiersBoîteNoire à Montpellier à partir 8 du 12 mars, 23 février, 2021.

Jimmy Richer est un jeune artiste émergent montpelliérain, né à la fin des années 1980. Il a poursuivi une formation artistique approfondie à l’École Supérieure des Beaux-Arts de Montpellier. Depuis 2012, il multiplie les exposition en France et surtout en région Occitanie. Ses œuvres polyvalentes se composent de fresques murales, dessins, peintures, bandes dessinées, gravures, etc interrogeant de grandes questions existentielles. Aujourd’hui, il est représenté par la Galerie Chantiers Boîte Noire qui favorise la représentation des jeunes artistes émergents.

« Jimmy Richer est conteur autant qu’il est artiste mais ses histoires sont particulières : elles n’ont ni début ni fin. Les représentations drolatiques tout droit sorties de l’esprit de l’artiste se composent en archipel. La seule manière de les appréhender est de naviguer de détail en détail. [1]» Stanislas Colodiet, ex-conservateur au Musée Fabre de Montpellier et directeur du CIRVA, Marseille.

Cartel Jimmy Richier
Jimmy Richier, Fresque murale, 2021.

À travers ses œuvres, Richer nous raconte un univers narratif attendant d’être découvert à partir de chaque œuvre qui correspond à un élément de ce récit. Ni Plat Ni Sphère (12.03-10.07. 2021) est une exposition en deux volumes : l’architecture de la galerie Chantiers Boîte Noire nous propose une visite en deux temps qui répond totalement à la diversité des types d’œuvres et de récits de l’exposition. L’artiste a adopté un style artistique propre dès le début de sa carrière. Cette volonté lui a fourni divers titres sauf celui d’artiste, tels que dessinateur, caricaturiste, cinéaste, auteur de fiction et même naturaliste [2]. Il s’inspire également de l’art japonais contemporain tel que les œuvres du créateur de films d’animation Hayao Miyazaki et de l’art japonais traditionnel tel que le peintre Hokusai. Nous pouvons remarquer dans cette exposition l’hommage fait à Hokusai lorsque Richer réalise à l’aquarelle une peinture [3] ressemblant à une page de bande dessinée qui renvoie à La Grande Vague de Kanagawa. Compte tenu de tous ces points d'inspiration, Richer a une identité artistique et intellectuelle qui traite de différents domaines artistiques comme que la bande-dessinée, la peinture, le dessin, le tatouage et la gravure. Autour de la même thématique, il expérimente et met en œuvre différentes techniques artistiques telles que la sérigraphie, le dessin au feutre sur papier, l’aquarelle, la fresque murale. Les médiums se mettent en jeu, la gravure et la fresque reviennent en wall-painting contemporain.


Cartel Jimmy Richier
Jimmy Richier, Le(s) génie(s) naturel(s), édition limitée en sérigraphie sur papier Fedrigoni, Portfolios de 8 planches de 100 x 70 cm.

Pour pouvoir contextualiser tous ces éléments, il faut se référer à la série présentée pendant l’exposition. Les 8 sérigraphies intitulées Le(s) génie(s) naturel(s), comme des totems anatomiques, représentent des relations à la nature en fétiches polysémiques. Chaque dessin peut évoquer différentes notions aux yeux des spectateurs : monts, cols, crêtes, vallées, épines, bosses, éperons, fosses, cavernes, berges, ou bien, issus du monde animal, becs, crochets, pattes d’oie, ailes, hippocampe. L’artiste laisse l’interprétation aux visiteurs. Mais d’où vient cette idée de représenter la nature en fétiches polysémiques? Où dans l’histoire de l’art les totems anatomiques trouve-t-ils leurs origines ? L’utilisation des totems est introduite dans l’art avec une mission spirituelle et sacrée dès l’ère primitive. Charles de Brosses, inspiré des écrits de Hume, résume la notion de « fétichisme » de manière suivante : « l'investissement par l'esprit sauvage d'un « culte direct » d'objets quelconques doués de puissance et d’intelligence. [4]» Jimmy Richer n’est pas le premier artiste à employer les totems anatomiques dans ses oeuvres : Gaston Chaissac ( 1910-1964), peintre français, a commencé à peindre ses premiers totems à partir des années 1955 [5]. Les totems sont des sculptures monumentales représentatives de l'art particulier des peuples autochtones de la côte nord-ouest du Pacifique, en Amérique du nord. Ce choix de s’inspirer des totems est étroitement lié à une approche spirituelle à la nature. Nous ne constatons ni chez Chaissac, ni chez Jimmy Richer un totem composé d’éléments mécaniques ou industriels. Ils sont faits dans les couleurs principales de la nature (vert, rouge, marron, noir) et à partir des végétaux, cristaux, plantes que l’on peut facilement identifier dans la nature. En traversant cet espace qui semble s’approcher d’une grotte, le tableau vertical d’aquarelle nous accompagne vers la surface où il y a plus de lumière. Là, les œuvres, intégrant fresques murales et gravures naturalistes, gagnent plus de couleur et de vitalité. La ville de Montpellier a une remarquable histoire liée à la médecine et aux sciences naturelles. En tant que montpelliérain, Jimmy Richer a sans doute trouvé une source d’inspiration dedans. En 2020, pour le 800e anniversaire de la faculté de médecine de Montpellier, le musée Fabre avait privilégié la découverte de cet ensemble patrimonial unique à travers l’histoire de ses usages, dans un contexte montpelliérain, particulièrement favorable au développement des sciences médicale et pharmaceutique. Puis, durant l’été 2021, le Jardin des plantes a accueilli l’exposition photographique intitulée « L’humain dans son jardin » : « Le projet mené mêle des pièces emblématiques du conservatoire d’anatomie et du jardin botanique de la faculté. La combinaison de l’humain et du végétal, de la médecine et de l’art est très marquante dans l’histoire de l’université médicale depuis le Moyen-âge, la Renaissance et les Lumières [6]».


Cartel Jimmy Richier
Jimmy Richier, Ni plat Ni shère 5, 2021, 130 x 60 cm, encre sur papier.

Jimmy Richer n’est pas le premier artiste à engendrer différentes techniques, connaissances et questions existentielles ( le XVIIIe siècle et les gravures naturalistes, l’art japonais, les fresques murales et les totems anatomiques de l’art primitif). En 2020, Emmanuel Latreille, directeur du Frac Occitanie Montpellier, a invité Jimmy Richer à investir son espace. À cette occasion, l’artiste s’est exprimé ainsi : « J’aime englober les connaissances ; le monde est si complexe ! [7] » Afin de décrire l’aboutissement des connaissances scientifiques, d’anthropologie, d’éthologie, de sciences du langage, et autres, qui sont présentes à son exposition, L’Art Vues, magazine culturel de la région, évoque cette exposition de la manière suivante :


« Il y poursuit sa réflexion sur les transformations et les mutations qui affectent le monde. Dans ces nouvelles séries, l’artiste part d’une approche naturaliste pour évoquer les transformations, les croisements et les tissages que Le(s) génie(s) naturel(s) créent. L’artiste souhaite rendre compte de cette nouvelle situation (réchauffement climatique, épidémies, …) en inventant des récits qui permettraient de mieux habiter le monde alors que le discours scientifique rejoindrait le discours ésotérique [8]» .

Nous rencontrons également cet art où surgit l’ésotérisme chez Joseph Beuys : suite à un accident d’avion en 1943, Beuys a été sauvé par des paysans de Crimée, qui ont utilisé une technique ancestrale de prévention de l’hypothermie à base de feutre et de graisse animale. Pour la suite de sa carrière, il fut inspiré par les théories ésotériques de Rudolph Steiner, lui-même héritier du spiritualisme de Goethe et des romantiques allemands. Il a toujours employé ces éléments dans son art en tant que totems qui l’ont accompagné tout au long de la vie.

Cette exposition était un moyen pour Richer de raconter une histoire tirée de son imaginaire et d’inventer des récits pour mieux habiter le monde et particulièrement renouer avec nos humanités. Dès que le récit a touché à sa fin, les fresques murales, éphémères, exécutées lors de l’accrochage sont aussi arrivées à la leur. Jimmy Richer, en tant qu’artiste émergent de Montpellier est parvenu à marquer l’esprit des visiteursde l’exposition par son talent et son imaginaire.



1 Stanislas Colodiet, L'imagination comme pensée organique, galeriechantiersboîtenoire.com, 2020.

2 D’après ses gravures inspirées des gravures naturalistes du XVIIIe siècle. Il a représenté des 2 différentes races de papillons.

3 Toutes les photos sont prises par Deniz Yoruç.

4 André Mary, Retour aux choses sacrées : emblèmes, empreintes et fétiches, 2012.

5 Catalogue Collection art moderne - La collection du Centre Pompidou, Musée national d’art 5 moderne , sous la direction de Brigitte Leal, Paris, Centre Pompidou, 2007.

6 L’Art-vues, Montpellier : « L’humain dans son jardin » une expo à découvrir jusqu’au 10 octobre 6 au Jardin des plantes, 6 août 2021.

7 Virginie Moreau, Au FRAC OM, "Casa", de Jimmy Richer, science-fiction de nos origines, Hérault Tribune, 21 octobre 2020.

8 L’Art-Vues, Expo : Jimmy Richer présenté à la galerie chantiersBoîteNoire à Montpellier à partir 8 du 12 mars, 23 février, 2021.

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