top of page

« J’AIME PAS GARDER MES DESSINS DANS MON CARNET, ALORS JE LES COLLE. » MARA.

  • Photo du rédacteur: Léa Cabezon
    Léa Cabezon
  • 25 nov. 2021
  • 5 min de lecture

Mara est un jeune artiste d’art urbain très actif à Montpellier avec déjà un style très personnel, empli de poésie. Encore enfant dans l'âme, il aime que ses collages soient appréciés différemment par différents publics – chacun doit avoir la liberté de créer sa propre histoire avec les personnages.

Cartle Mara
Mara, Gros tag sur la Joconde, Montpellier, 2021.

C’est d’ailleurs en ce sens qu’il choisit de créer des personnages en noir et blanc avec une croix au centre du visage. C’est durant ses études de design à Montpellier qu’il a développé son personnage au visage à croix : plutôt que de rendre quelque chose qui ne lui plaisait pas, il a décidé de ne plus faire de visage et de placer une croix à la place.

Finalement, cette anonymisation permet de familiariser le personnage et de se l’approprier. Il met en scènes ces petits personnages dans des scénarios inspirés (ou non) de sa vie, tout en exhibant sa vision du monde, permettant à tous de s’identifier au personnage. Le message reste quand même au centre de la création : il aime ancrer ces figures dans l’actualité et dans le réel, donnant à ces marionnettes le rôle de porte-voix.

Créer un dialogue entre lui, sa création et le public reste primordial. Le street art est avant tout un échange, une vision sur le monde qui nous entoure, et Mara aime nous montrer la sienne. L’artiste semble visiblement prêt à envahir nos murs de lyrisme, d’humour et cynisme.


L’artiste collagiste ne souhaite pas privilégier un médium plutôt qu’un autre, et aime se laisser le choix en explorant le sticker, le tableau, et tout autre moyen artistique. Il estime que chaque pratique artistique a son propre but et touche le public d’une manière différente. Pour lui, les stickers sont par exemple un moyen d’essaimage rapide et efficace. Néanmoins, il préfère utiliser chaque médium au gré de ses envies. Il déclare que certains sujets sont plus faciles à traiter par le biais de la toile, et que l'impact peut être plus grand que celui du mur et vice-versa. Prenant en exemple un tableau à peine terminé dans son atelier, il affirme que cette œuvre n’aurait clairement pas eu la même portée si elle avait été réalisée sur un format plus libre que le mur – son impact aurait été amoindri, là où le cadre de la toile permet d’accentuer le message.


Cartel Mara
Mara, 🙂 ou ❤️ ou 🍆, Montpellier 2021.

D’ailleurs Mara n’a pas la même vision du mur que la majorité des autres artistes : il ne pense pas que le mur soit un exutoire ou une liberté bienvenue pour l’artiste.

Il trouve que cette sensation de liberté relève davantage d'un fantasme relayé par les médias traditionnels plutôt qu’une réalité.


Pour autant, son travail de collagiste s'inscrit dans la lignée des grands noms du street art, il est indéniable que son travail fait penser à celui d’Ernest Pignon-Ernest (pour ses œuvres en contraste noir et blanc) ou encore à celui de Combo Culture Kidnapper pour son humour et son cynisme. Il dit également avoir découvert le street art par le biais de Banksy, qui semble être une source d’inspiration évidente pour lui. Ajoutons à ces références artistiques Blek le rat.

En dépit de son envie de rationaliser le mur uniquement comme une surface de travail, il est conscient que la rue a un impact dans sa création artistique autant que dans la réception de l’œuvre elle même.

Ce qu’il aime avec la rue, c’est son impact. Il vient parfois de la rue elle même, d’autres fois du regard des passants. La rue permet un engagement dans le réel et l'ajout d'une autre dimension, qu'elle soit politique, sociale, ou poétique.

Outre la volonté de l’artiste de ne pas politiser ou intellectualiser son œuvre, il demeure que le geste même de pratiquer son art dans la rue le rend politique, social et même économique. Il parle d’une volonté plus profonde de créer un dialogue entre l’artiste, l’œuvre et le public. Il estime que ses collages ou tableaux n’ont pas besoin de bagage culturel ou intellectuel pour que l'on puisse les interpréter. C'est en ce sens que le dialogue semble être plus intéressant et important pour l’artiste.

Mara a appuyé plusieurs fois sur le fait qu’il aimait mettre son travail en corrélation avec le monde du rap plus qu’avec le monde de l’art urbain. Il explique que ses dessins et collages sont pour lui à l’image de bonnes « punchlines » musicales : il les considère achevés lorsqu'il sent que le public aura une réaction. Il ajoute que le rap reste relativement simple à comprendre car il s'adresse à tout le monde, davantage que d’autres types musicaux.


Ce style musical semble bien mieux reçu pas les jeunes, et c’est peut être en ce sens que pour lui le rap est plus facile à comprendre. Né dans les années 90, il a grandi avec le rap et d’autres mouvements issus de la culture urbaine. Il est donc plus prompt à appréhender le rap.

De surcroît, il est important de rappeler que le rap, comme son art, est rempli de références « simples, basiques ».


Cartel Mara
Atelier de dessin avec des jeunes enfant (6-8 ans) animés par Mara.

Pour accentuer sa volonté, il a choisi de travailler presque uniquement avec le noir et le blanc, qui sont des couleurs plus impactantes et plus accrocheuses.

Le choix de ne pas coloriser ses œuvres est aussi une volonté de ne pas forcément s’impliquer, de ne pas donner d'indications de lecture au spectateur.

Mara a réalisé de nombreux travaux collectifs au cours des dernières années. En cherchant à savoir si ces œuvres collaboratives étaient une volonté de sa part, Mara nous confie que ce sont très souvent des opportunités fortuites. Il ne cherche pas forcément à travailler sur de grandes fresques collaboratives ou encore avec des enfants – comme il a pu le faire lors de ses ateliers de dessins ou encore avec son travail à l’école publique élémentaire Jules Verne à Montpellier.


Cartel Mara
Mara et les écoliers, façade de l'école élémentaire publique Jules Verne à Montpellier, 2020.

C’est un travail qu’il a adoré faire, et il a été surpris de la réception qu’avaient eu les enfants. En effet, il a trouvé le dialogue avec les enfants très innovant et enrichissant. Lorsque nous avons évoqué son travail collaboratif, nous avons parlé de la grande fresque éphémère réalisée au Polygone à Montpellier, au cours de la crise sanitaire, en janvier 2021. Il a aussi beaucoup apprécié le projet en collaboration avec l’artiste No Luck, qui comme lui a son atelier dans les locaux de l’association Line UP . Ils ont tous deux créé une des trois fresques faisant au total près de vingt mètres de long, mélange des personnages de Mara avec le travail calligraphique inspiré de runes antiques de No Luck. Il a trouvé que le travail collaboratif avec d’autres artistes sur des murs immenses était très formateur.

Enfin nous avons évoqué les projets futurs de l’artiste. Nous lui avons demandé quelles étaient ses envies pour l’année à venir, et il nous a confié avoir vraiment envie de voyager afin de découvrir de nouvelles cultures et de s’en imprégner afin d’enrichir son œuvre (ou coller dans de nouveaux endroit sans se donner de but ou de lieu précis).


Cartel Mara
Mara et No Luck, Fresque collective Polygone, Montpellier, 2021.

Pour finir, nous pouvons dire que Mara est un artiste avec une volonté bien différente de ses prédécesseurs issus du mouvement urbain. En effet, il aime travailler au gré de ses envies sans réellement vouloir engager un discours politique ou social à proprement parler. Il aime commenter l’actualité avec un brin d’humour, et a cependant su trouver son identité propre – traduite notamment par son utilisation du noir et blanc, le rendant unique au sein du mouvement urbain. S'il est conscient que son travail dans la rue a forcément un aspect politique, social et économique, pour autant, il rend la lecture de ses œuvres la plus simple possible. Il crée en fonction de sa culture et de ses connaissances en étant conscient que chacun est libre d’interpréter et de comprendre. Il aime discuter de son travail et des appréciations différentes de son œuvre. Laissant des références communes (conscientes ou inconscientes), qui sont des outils pour décrypter ses collages ou tableaux, il ne mise cependant pas tout dessus, laissant la culture personnelle faire le reste du travail.


Instagram de l'artiste : @mara_mtp

Facebook de l'artiste : Mara

Comments


bottom of page